Jules César (et Cléopâtre) sur écran noir
Avant d’accueillir la version haendelienne de Jules César sur la scène du Théâtre, petite chronique des grands César et Cléopâtre de l’histoire du cinéma…
Il y a une quinzaine d’années, une bande de deux minutes du Cléopâtre réalisé par Georges Méliès en 1899 fut miraculeusement retrouvée. On y voit de façon furtive et trouble le moment de la profanation du tombeau de la reine d’Egypte, l’apparition d’une momie carbonisée et de fumée d’où surgit la reine légendairement immortelle. Cléopâtre, sous les traits de Jeanne d’Aley, la muse de Méliès, laisse là sa première trace sur un écran noir. Il faudra attendre 1909 pour qu’à son tour apparaisse la figure de Jules César dans un court-métrage de treize minutes intitulé Julius Cesare, adapté de la tragédie de Shakespeare et réalisé par Giovanni Pastore. En 1917, Theda Bara, la star américaine du cinéma muet (1885-1955) incarne la reine d’Egypte dans le Cleopatre de J. Gordon Edward. Dix-sept ans plus tard, c’est au tour de la française Claudette Colbert d’enflammer les esprits dans une nouvelle version signée Cecil B. DeMille. En 1944, une autre star, Vivien Leigh, alors doublement auréolée de sa love affair avec Lawrence Olivier et du triomphe de Gone with the wind tourne à Londres Caesar and Cleopatra, adaptation pour l’écran de la pièce de George Bernard Shaw.
Puis vint l’ère « romaine » de Mankiewicz sous la forme d’un diptyque inaugurée en 1953 avec Julius Cesare, un drame historique qui revient à la trame Shakespearienne avec notamment Luis Calhern (Jules César), Marlon Brando (Marc Antoine) et James Mason (Brutus). Si le personnage de Cléopâtre n’apparait pas dans le premier opus « romain » du cinéaste (restant ainsi fidèle à la pièce éponyme du dramaturge anglais), elle est dix ans plus tard au centre de Cléopâtre, commencé par Manoulian mais achevé par Mankiewicz. Elisabeth Taylor est au sommet de sa beauté et de sa gloire, entourée du Jules César de Rex Harrisson et du Marc-Antoine de Richard Burton. Ce film reste dans toute l’histoire du 7eme art celui de tous les excès : 40 millions de dollars de budget, des mois de retard sur le planning de tournage, 26.000 costumes confectionnés, près de 5h20 dans sa version restaurée… Sans compter les frasques au quotidien du couple Taylor / Burton. Mais le film devient un mythe.
S’il est difficile d’envisager version plus « pharaonique » ; signalons néanmoins qu’en 1953, la toute jeune Sophia Loren incarne la reine d’Egypte aux côtés du Jules César d’Alberto Sordi dans Due Notti con Cleopatra sur un scénario d’Ettore Scola. Au début des années 1980, Jean Yanne réalise sa comédie Deux heures moins le quart avant Jésus Christ avec, tout juste sorti de son succès dans La Cage aux folles, Michel Serrault en empereur romain aux cotés de la Cléopâtre de Mimi Coutelier. Enfin plus récemment, le Jules César d’Alain Chabat était irrésistible face au charme aussi sensuel qu’autoritaire de la Cléopâtre de Monica Bellucci dans Astérix et Obelix : Mission Cléopâtre en 2002, tandis le Jules César d’Alain Delon six ans plus tard en 2008 rendait hommage avec humour autant à Lubitsch (Avé moi) qu’à sa propre filmographie (Le Clan des siciliens, Rocco et ses frères, Le Guépard, le Samouraï…) dans l’épisode des aventures du petit gaulois consacré cette fois-ci aux Jeux Olympiques.
Jules César en Egypte le 23 et 25 octobre 2023