

Fille – bien sûr – unique d’un père percussionniste et d’une mère danseuse, Yuja Wang (prononcez “Yudja”, ndlr) commence le piano à l’âge de 6 ans. Contrairement aux enfants des “mères tigres” chinoises d’aujourd’hui, elle fait du piano pour s’amuser et assure n’avoir jamais été poussée par ses parents! Pour le plaisir, elle prend des cours de danse, de calligraphie, de poésie… avant de décider que le piano sera sa grande passion.
De cette période, elle garde l’insouciance et la curiosité – elle dit que les musiciens sont d’éternels enfants qui ne grandissent jamais et regardent tout avec créativité, l’esprit ouvert.
C’est donc lorsque la petite Yuja a 6 ans que sa mère l’emmène à une répétition du Lac des Cygnes. La musique de Tchaïkovski l’impressionne tout autant que la danse.
Une fois à la maison, sa mère l’assure qu’elle pourrait reproduire toutes les sonorités de l’orchestre sur le piano de la maison. Ce à quoi la petite fille s’attèle immédiatement.
A l’âge de 14 ans, seule, Yuja part étudier d’abord au Canada, puis au célèbre Curtis Institute de Philhadelphie.
A 18 ans, elle remplace au pied levé d’abord Radu Lupu, puis, deux ans plus tard, Martha Argerich pour un concert avec le Boston Symphony Orchestra. Elle n’est alors présentée que comme une jeune diplômée du Curtis Institute… Le soir même, après le concert, elle est une star.
Dix ans plus tard, c’est l’une des pianistes les plus connues au monde.
“Si la musique est sensuelle et envoûtante, pourquoi ne pas s’habiller en conséquence?” lance joyeusement celle qui est depuis longtemps décriée pour les vêtements audacieux qu’elle arbore sur scène. Talons de 12cm, mini-jupes, décolletés, paillettes, elle essaye tout! Et si elle dit que la mode l’ennuie, elle prend un malin plaisir à énerver le public conservateur.
“En réalité, dit-elle, peu de choses me vont – je suis tellement petite que l’on ne me verrait même pas dans une robe de concert traditionnelle ! Je porte toujours des couleurs unies car la couleur impacte l’humeur; la première chose qui influence les gens dans un concert, c’est l’élément visuel. Je met toujours quelque chose de simple, mais qui me donne de l’assurance“.
Yuja Wang (c) Ian Douglas
“I’m Chinese. We don’t do guilt. We do zen” (“Je suis chinoise. On ne fait pas dans la culpabilité, mais dans le zen“), dit un jour Yuja Wang à un journaliste qui tentait de percer le mystère de son incroyable stabilité et maîtrise de soi.
Intéressée par le taoïsme, indépendante, moqueuse, Yuja Wang avance sans regarder derrière, et les quelques annulations qu’on lui connaît ne sont dues qu’aux recommandations de son médecin (“de la fatigue musculaire, apparemment, je jouais trop! Mais c’est réglé”)
Après avoir joué aux côtés des plus grands et maîtrisé le sommet qu’est la Hammerklavier de Beethoven, le prochain défi que se donne Yuja Wang est de diriger un orchestre. Mais pour l’instant, avec l’Orchestre symphonique de Birmingham sous la baguette de Mirga Gražinytė-Tyla, elle reste dans son élément avec le concerto pour piano et orchestre n°4 de Prokofiev.