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Le portrait de Gladys van Thuyne

Si l’habit ne fait pas le moine, le costume est un élément important pour tout chanteur en scène. Les mains expertes de Gladys, son attention à chaque détail même le plus infime et sa générosité communicative font des merveilles pour chacun. Elle et ses « Ginettes » (son équipe) sont tout au long d’une représentation aux petits soins pour permettre aux artistes d’avoir toute la liberté de s’exprimer pleinement sur un plateau sans avoir à combattre une baleine d’un corset qui meurtrit une côte, ni se soucier d’un chapeau en dangereuse posture. 

Depuis quand êtes-vous au Théâtre et quelle est votre fonction ?

J’ai débuté en tant qu’habilleuse au TCE il y a presque 4 décennies avec La Périchole de Jérôme Savary et Medea de Bob Wilson et David Bryars. Puis je suis devenue Cheffe habilleuse lors de la production de La Pie Voleuse de Rossini, mise en scène de Pier Luigi Pizzi en 1988. Jusqu’en 2010, j’avais également la responsabilité du service costume.

 

Comment avez-vous appris votre métier ?

J’ai travaillé trois ans au Théâtre Marigny où j’ai beaucoup appris sur la technique de mon métier, en particulier sur l’entretien des costumes. En parallèle, j’ai suivi des cours de coupe et moulage à la Mairie de Paris. Chaque rencontre, chaque production nous fait découvrir différentes techniques et astuces.
Le NEW YORK CITY BALLET avec Christian Lacroix avait une technique pour pendre les tutus par l’entrejambe ou assainir les costumes avec de la vodka pure, technique que nous avons adoptée. Avec le BOLCHOI, c’était la façon de bloquer l’attache des tutus en passant un grand point glissé pour empêcher les agrafes de s’ouvrir pendant le spectacle.
Nous avons adopté le système du ROYAL BALLET pour les loges des changements rapides en intégrant des porte-manteaux aux paravents ce qui nous a donné plus d’espace et de temps.

 

Avec qui travaillez-vous au quotidien ?

En amont des représentations, je travaille avec le directeur technique et l’équipe costume et habillage, constituée à chaque production scénique pour les préparatifs. Ensuite, nous collaborons directement avec l’équipe artistique et la régie générale au début des répétitions. Nous nous mettons ainsi d’accord sur les espaces installés sur le plateau avec les services Machinerie, Électrique ou Accessoire. Enfin, nous collaborons étroitement avec les équipes Maquillage et Coiffure pour les changements de costumes, maquillages, coiffures. Nous sommes parfois 4 ou 5 personnes autour d’un artiste pour réaliser un changement de costume en coulisses.

 

Ce qui vous plaît le plus dans votre métier ?

Le sens même de mon métier : participer à donner du rêve. Le rêve est essentiel et intemporel dans l’existence. Il permet de vivre mieux.
J’aime également le côté psychologique de mon métier ; rassurer, être à l’écoute, aider les artistes, qu’ils soient assurés d’avoir à leur disposition toute notre savoir-faire technique pour rester concentrés sur leur art.

Enfin, j’aime la joie de vivre des artistes, les rencontres, les échanges et travailler en équipe.

 

La réalisation dont vous êtes la plus fière ? 

Alceste mis en scène Jean louis Martinoty, créé à l’opéra de Versailles après sa réouverture puis joué au TCE et à l’opéra de Montpellier ; Roland de Lully créé au TCE mis en scène Gilbert Deflo et qui a fait l’ouverture du centre de Belém à Lisbonne en décembre 1993.

La Périchole de Jérôme Savary en 1984. Les danseuses du Moulin Rouge arrivaient en car au Théâtre pendant le spectacle, nous les changions rapidement au foyer de la danse, pour le bal du Vice Roi du Pérou. Elles dansaient le French cancan et repartaient aussi rapidement au Moulin en emportant dans leurs sacs leurs costumes.

 

Votre meilleur souvenir au Théâtre des Champs-Elysées ?

Le grand plateau du TCE couvert de roses rouges pour les saluts de l’étoile Maia Plissetskaïa qui venait d’interpréter la mort du cygne à 70 ans. Regarder Sylvie Guillem danser. Les applaudissements sans fin pour Natalie Dessay, Cecilia Bartoli et beaucoup d’autres artistes. Les holàs en coulisses de la technique pour saluer les artistes après leurs performances.

 

Votre plus belle rencontre artistique ?

J’en ai plusieurs :
Les chefs Jean Claude Malgoire, Evelino Pido, Jérémie Rhorer et Emmanuelle Haïm, les metteurs en scène Jean Louis Martinoty, Pier Luigi Pizzi, Eric Genovese et Eric Ruf.
Parmi les chanteurs, Gabriel Bacquier, Donald Maxwell, José van Dam, Pietro Spagnoli, Marc Scoffoni, Philippe Jaroussky, Robert Gleadow et Stanislas de Barbeyrac… Et du côté des femmes Angelina Kirchschlager, Patrizia Ciofi, Cécilia Bartoli, Véronique Gens, Sandrine Piau, Sabine Devieilhe, Catherine Trottmann, Lucile Richardot, Éléonore Pancrazi…
Sans oublier Sylvie Guillem, Ana Laguna, Sara Baras, Nicolas Le Riche pour la danse et Christian Lacroix et Urzula Patzak pour les costumes.

 

L’œuvre qui vous rend le plus heureuse ?

La Périchole ! Surtout en ces temps difficiles… J’ai aimé la récente Périchole de Laurent Pelly en tant que spectatrice, j’ai beaucoup ri.

 

Votre hobbie quand vous n’êtes pas au Théâtre ? 

La cinéphilie, la lecture et confectionner des vêtements, des accessoires ou même des attrapes rêves……

 

Vous partez bientôt à la retraite… Qu’est ce qui va vous manquer quand vous quitterez le Théâtre ?

Ce qui me manquera le plus sera de ne plus revoir aussi souvent les collègues, les amis, les artistes et de ne plus ressentir l’électricité, l’effervescence du Théâtre.
L’ambiance du Théâtre des Champs-Elysées est si magique, si fusionnelle. Le manque du lever du rideau où pour chasser le stress, on « danse du hip-hop » dans la fosse d’orchestre avec Robert Gleadow en Figaro pendant l’ouverture des Noces (mise en scène de James Gray) ou faire « quelques pas de flamenco » avec Patricia Petibon avant son entrée en scène pour Pelléas et Mélisande mis en scène Eric Ruf.

Tous ces moments présents si intenses vont me manquer.