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    La vraie histoire de Roberto Devereux

    Troisième et ultime opéra de Donizetti où apparaît la reine Elisabeth Ire d’Angleterre, Roberto Devereux se penche sur les dernières années de la reine vierge. Mais, entre l’histoire et sa version lyrique, il y a un (très) grand pas… On vous raconte !

    La vraie histoire

    1601. Un an auparavant, on brûlait Giordano Bruno à Rome, Cervantes publiait Don Quichotte, Marie de Médicis épousait Henri IV à Florence, tandis qu’à Londres, Shakespeare créait chef-d’œuvre après chef-d’œuvre.

    Elisabeth Ière, fille d’Henri VIII et dernière représentante des Tudor sur le trône anglais, règne depuis 42 ans. A sa cour, ses vieux favoris et conseillers laissent place aux nouveaux. Mais de nouveauté, point trop ! C’est un petit monde. Son nouveau favori, Robert Devereux, n’est autre que le beau-fils du précédent. Quant à son conseiller, Lord Cecil, facile ! Le père est mort, le fils reprend le flambeau – Walter ou Robert, qu’importe ? Jugée irascible et indécise, celle que l’on surnomme la Reine vierge ne l’est pas forcément : jamais mariée, sans descendance, elle n’est pas sans sentiments !

    A la source de l’intrigue

    Robert Devereux, comte d’Essex, retourne d’une mission en Irlande sans autorisation de la Reine fin 1599 et est arrêté. Il est disgracié en 1600 et jugé. Assigné à résidence, il fomente alors un complot le 8 février 1601 et est décapité à la hache le 25 février 1601. C’est cette période de presque un an et demi entre son retour, la disgrâce, le jugement, le complet et l’exécution, qui est résumée dans l’opéra en trois heures.

    Roberto Devereux, costumes de Moritz Junge

    De l’histoire à l’opéra : les personnages

    Dans l’opéra, l’intrigue se noue autour d’un triangle amoureux : la Reine Elisabeth aime Devereux qui aime Sara, qui est mariée à l’ami de Devereux, Lord Nottingham. Accusé de haute trahison et privé de ses soutiens politiques, Devereux finit par y perdre sa vie.

    Qui est qui dans l’histoire ?

    Retrouvez ci-dessous les vrais personnages historiques et l’âge qu’ils avaient au moment des faits racontés dans Roberto Devereux.

    De l’histoire au théâtre

    L’histoire de Robert Devereux est raconté au théâtre dès 1639 et alors qu’il s’agit alors de l’histoire – très – récente. Les inexactitudes sont nombreuses (Lord Cecil se transforme ainsi en une “Mme Cécile, maîtresse du comte”), et des détails pittoresques naissent pour corser l’intrigue.

    C’est de là que date l’histoire de la bague donnée à Robert par la reine, qui lui promet de répondre à toute demande qu’il ferait avec cette bague. Robert demande à “Mme Cécile” de transmettre la bague à la reine avec une demande de grâce ; celle-ci se venge en ne le faisant pas, Robert meurt.

    Il y eut trois autres pièces avant que Donizetti ne s’inspire de celle d’Ancelot, qui avait déjà servi pour le livret de l’opéra de Mercadante quelques années auparavant.

    Le prequel

    Lettice Knollys, mère de Roberto Devereux et déjà rivale d’Elisabeth I

    La vraie histoire est cependant plus incroyable encore que celle inventée par les auteurs de théâtre. Car il y a, dans l’histoire qui lie la reine Elisabeth et Robert Devereux, un sacré prequel.

    Robert est fils de Lettice Knollys, petite fille de Mary, sœur d’Anne Boleyn (mère d’Elisabeth I). La rivalité entre Anne et Mary pour les faveurs d’Henri VIII est alors bien connue. Robert perd son père à 13 ans, et sa mère épouse alors Robert Dudley, le favori du moment d’Elisabeth I, lors d’un mariage tenu secret de la reine.

    Pour finir de vous confondre, la duchesse de Nottingham, dont est censé être amoureux Robert Devereux, est la cousine germaine de sa mère. Elisabeth Ière avait donc mille raisons d’en vouloir aux deux tourtereaux. Un si petit monde !

    Le sequel

    On ne saura jamais si la duchesse de Nottingham était réellement un amour de Robert Devereux. Coincidence émouvante : elle meurt deux ans après l’exécution de Robert, jour pour jour, le 25 février 1603.

    Curieusement, la personne la plus affectée à la mort de Catherine Carey/Sara est… la reine elle-même. Elisabeth Ière, qui lui est attachée, perd l’une de ses dernières amies. La reine meurt à son tour un mois plus tard.

    Nous sommes très loin de la rivalité imaginée par les dramaturges… mais cela nous a permis de vous raconter une belle histoire !

    Crédits photo:

    1. Portrait de la reine Elisabeth I par Marcus Gheeraerts the Younger (circa 1595) 2.Portrait supposé de Catherine Carey, Duchesse de Nottingham, attribué à Robert Peake the Elder and his studio, c. 1597. Domaine public. The Weiss gallery. 3. Charles Howard, 1st Earl of Nottingham, by unknown artist (1602). 4. Robert Cecil, par John De Critz the Elder (1602) 5. Portrait d’un jeune homme, probablement Robert Devereux (1566–1601), par Nicholas Hilliard (1588). (c) Metropolitan Museum of Art. 6. Lettice Knollys, portrait attribué à George Gower.