Boston Ballet fait ses débuts à Paris
Incroyable mais vrai : l’une des plus grandes troupes de ballet américaines ne s’est jamais produite à Paris. Voici l’injustice corrigée : le Boston Ballet est au Théâtre des Champs-Elysées en avril 2019 ! Portrait.
La troupe du Boston Ballet se produit dans l’impressionnante salle de 2500 places du Boston Opera House. Soixante-six danseurs de 16 nationalités différentes excellent dans un répertoire allant des ballets classiques de Petipa (le directeur de la troupe, Mikko Nissinen, danseur et chorégraphe finlandais né à seulement 18km de la frontière russe, est passé par l’école Vaganova) aux créations des plus grands chorégraphes contemporains. C’est cette facette-là de leur travail que la troupe du Boston Ballet a choisi de présenter au public parisien. Mais avant, un peu d’histoire !
Il y a 55 ans, une femme, un chorégraphe, un mécène…
L’une des compagnies les plus importantes aux Etats-Unis aujourd’hui, le Boston Ballet est né d’une étonnante histoire de mécénat. Il fait partie des huit compagnies américaines, aux côtés des ballets de Philadelphia, Houston et Washingon, créées grâce à un don de la fondation Ford de 7,7 millions de dollars (environ 56 millions d’euros aujourd’hui), en 1963.
Fait plus étonnant encore, en plus du New York City Ballet, le don de la fondation Ford avait été accordé non à des compagnies existantes ou à des chorégraphes, mais à des écoles de danse, toutes dirigées par des femmes. Les compagnies ainsi fondées existent toutes encore aujourd’hui.
Quant au nom de E. Virginia Williams, la future fondatrice du Boston Ballet, il avait été soufflé à Ford par George Balanchine lui-même. Issue d’une famille au passé fascinant (son père est descendant du fondateur de Rhode Island, la famille de sa mère était arrivée aux Etats-Unis sur le deuxième bateau après le Mayflower, en 1620), elle avait assisté à des représentations de danse classique dès l’âge de 2 ans, et avait très vite intégré une école de ballet.
Sans avoir jamais dansé sur scène, elle s’était d’emblée consacrée à l’enseignement, où elle excellait. L’existence même de la troupe du Boston Ballet serait due au fait qu’elle “ne voulait pas que ses élèves aient à déménager pour trouver du travail“. Omniprésente, elle a exercé presque tous les métiers au sein de la compagnie, de la direction à la chorégraphie, de la réalisation des costumes au contrôle des billets le soir des représentations.
Du ballet classique à l’avant-garde
Le Boston Ballet est tout particulièrement célèbre pour son spectacle annuel de Casse-Noisette, qui attire des milliers de gens chaque saison. Le ballet classique est à l’origine de son ADN. Dès les années 1970, Margot Fonteyn et Rudolph Nureev se produisent avec la compagnie, et l’association avec Nureev dure une bonne dizaine d’années.
Dès l’origine, le ballet néoclassique, basé sur la technique de Balanchine, est l’un des piliers de la compagnie. Les élèves de E. Virginia Williams sont parmi les rares que le chorégraphe accepte parmi les observateurs dans ses studios de répétition à New York. C’est ainsi que, du Lac des Cygnes, Nureev finit vite par interpréter Apollo, l’un des ballets iconiques de Balanchine.
Le ballet au chevet des dictatures
On ne peut bouder le plaisir de partager avec vous deux anecdotes aussi amusantes qu’importantes pour l’histoire du ballet. En 1980, le Boston Ballet est la première compagnie de ballet américaine à se produire en Chine, lors d’une longue tournée qui les mènent de Pékin et Shanghai à Guangzhou, avec des stanging ovations.
En 1990, le Boston Ballet défraie la chronique avec ce qui sera appelé le “The Glasnost Swan Lake” : la mise en scène de Sergeyev, avec les étoiles des ballets du Bolshoï, du Kirov et du Boston Ballet (pour les balletomanes : il s’agissait de Nina Ananiashvili et Alexei Fadeyechev du Bolshoi ; Aleksandr Lunev, Yulia Makhalina, Tatyana Terekhova, et Konstantin Zaklinsky du Kirov).
Au cœur de la création
Dès son origine, le Boston Ballet travaille avec les chorégraphes contemporains qui sont aujourd’hui des légendes, de Jerome Robbins et Merce Cunningham à Twyla Tharp (dont ils font des créations mondiales) ou Jorma Elo. Le Boston Ballet a été la première compagnie que Jiří Kylián a autorisée à interpréter ses ballets, après sa propre compagnie Der Nederlands Dance Theater. Son “Wings of Wax” fait partie de la tournée parisienne.
Le grand William Forsythe vient de créer pour le Boston Ballet un nouveau ballet, “Playlist (EP)”, en plus du brillant “Pas/Parts”, également au programme. Les deux ballets sont à découvrir en avril !